Mali : ‘’J’ai dû fuir mon village sans prévenir ma femme et mes enfants’’

WFP West Africa
4 min readFeb 25, 2022

Dans le centre et le nord du pays, le Programme alimentaire mondial (PAM) assiste des milliers de personnes qui ont tout laissé derrière elles pour fuir les violences.

Par Mahamadou ABDHOURAMANE

Ousmane, déplacé interne, chef de ménage, devant son abri. Photos : WFP/Mahamadou Abdourhamane

Encore sous le choc du passé et le joug du quotidien, Ousmane, chef de famille de 32 ans, se souvient encore de sa séparation brusque d’avec son épouse et ses enfants. Craignant pour sa vie, il quitte en catastrophe (un mardi après-midi) son village à la recherche d’un refuge plus sûr.

« Je conduisais mes animaux au pâturage quand j’ai appris que des hommes armés sont arrivés dans notre village et ont enlevé des habitants avec leur bétail. Je n’ai pas eu le temps de retourner en famille, de peur d’être intercepté et tué dans le village » a expliqué Ousmane. « J’ai fui et laissé mes animaux dans la nature. » rajoute-t-il.

Originaire de la région de Tombouctou, Ousmane fait partie de ces personnes déplacées internes dont le village est fréquemment victime de violences, d’enlèvement et de vols de bétails par des individus armés non identifiés. Comme la plupart des personnes déplacées internes, Ousmane n’a rien pu sauver de ses biens sauf les vêtements qu’il portait sur lui ce jour-là.

Dans un contexte humanitaire déjà fragilisé par les chocs climatiques et la pandémie de la COVID-19, la nature des déplacements de populations demeure imprévisible au Mali. En septembre 2021, il a été recensé plus de 400.000 personnes déplacées internes, soit six pour cent de plus qu’en juillet de la même année selon les derniers chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). Tout comme Ousmane, la survie de ce nombre croissant de déplacés internes dépend principalement de l’assistance humanitaire et des mécanismes de solidarité communautaire.

« Ayant constaté mon absence prolongée et inhabituelle, et face à la fuite des habitants du village, ma femme et mes enfants ont, à leur tour, quitté précipitamment le village. Nous nous sommes retrouvés sains et saufs quelques semaines plus tard », se réconforte Ousmane.

Une fois déplacées, les familles ont peu ou pas d’accès aux moyens de subsistance. Assistés et obligés de solliciter la solidarité des populations hôtes, ce nouveau mode de vie est loin de conforter Ousmane et les autres membres de son village dont l’élevage constituait la principale source de subsistance.

Une boutique d’échange de bons d’achat des aliments. Photos : WFP/Mahamadou Abdourhamane

« J’ai été accueilli par des connaissances qui ont vraiment fait preuve de solidarité envers moi » relate Ousmane. « Mais lorsque ma famille m’a rejoint, mes charges ont triplé. Et le peu de ressources que mes connaissances me donnaient ne suffisaient plus à répondre à nos besoins. », poursuit-il.

Ousmane fait partie des 85 500 personnes déplacées — dont une majorité de femmes et enfants — ciblées par l’assistance alimentaire du PAM soutenue par la Direction générale de la protection civile et des opérations d’aide humanitaire européennes (ECHO).

Ousmane debout devant la porte d’entrée d’un magasin d’aliments. Photos : WFP/Mahamadou Abdourhamane

Cette aide sous forme de bons d’achat — échangés contre des aliments auprès de commerçants locaux contractés par l’agence onusienne et ses partenaires — ou en espèces, intervient dans le cadre de la réponse aux besoins alimentaires et nutritionnels des déplacés internes pendant une période comprise entre un et trois mois à la suite de leur déplacement.

« L’assistance alimentaire du PAM est vitale pour ma famille et moi » clame Ousmane. « Mais je souhaite retourner vivre chez moi avec ma famille et continuer mes activités », confie ce père de trois enfants.

En 2021, l’assistance alimentaire et nutritionnelle d’urgence du PAM a été fournie à plus de 104, 000 personnes dans les régions de Bamako, Gao, Kayes, Koulikoro, Ménaka, Mopti, Ségou, Tombouctou et Taoudéni. Parmi ces bénéficiaires, se trouvent 18,625 accompagnants ou parents d’enfants en situation de malnutrition aiguë sévère hospitalisés dans les pédiatries et les Unités de récupération et d’éducation nutritionnelle intensive (URENI), assistés également grâce au soutien financier d’ECHO.

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