Mali : Renforcer le pouvoir d’achat des ménages vulnérables grâce aux filets sociaux
Par Myrline Sanogo-Mathieu
Devant le magasin où elle doit échanger son coupon électronique contre des vivres alimentaires de son choix, Ada, foulard bien vissé sur la tête, arbore un large sourire, attendant son tour de faire ses emplettes.
A 55 ans, cette veuve vit avec ses 11 enfants dans une localité de Douentza, une région du centre du Mali. Depuis le décès de son mari, la charge de la famille lui revient seule. De temps en temps, son fils aîné, âgé d’une vingtaine d’année, fait de son mieux pour l’épauler. Toutefois, ses revenus sont très faibles en raison du caractère précaire des activités occasionnelles qu’il mène. Cela n’est donc pas suffisant pour permettre à Ada de répondre aux besoins de son ménage.
« Mon fils aîné fait des petits boulots occasionnels sur des chantiers et parfois au marché pour trouver quelque chose à apporter en famille. La plupart du temps, il rentre bredouille, car ce n’est pas tous les jours qu’il y a du travail », se lamente-elle.
Depuis le décès de son mari, Ada qui vivait de l’agriculture, n’a plus accès au petit lopin de terre qu’ensemble, ils louaient de temps en temps, faute de moyens financiers.
Elle fait aujourd’hui partie des bénéficiaires de l’assistance alimentaire et nutritionnelle fournie par le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies dans le cadre du programme de Protection sociale adaptative, en collaboration avec le gouvernement du Mali. Basé essentiellement sur des transferts monétaires, ce programme favorise une augmentation des moyens d’existence des ménages vulnérables pour les aider à faire face à leurs besoins alimentaires et nutritionnels.
« Quand on m’a appelé pour recevoir cette assistance, je me tournais les pouces, me demandant comment nourrir ma famille dans les jours à venir. Il ne me restait plus que des céréales pour deux jours de repas », relate Ada.
A travers le programme de Protection sociale adaptative, le PAM et ses partenaires œuvrent au quotidien pour apporter une assistance alimentaire et nutritionnelle aux communautés affectées par l’insécurité alimentaire, la hausse des prix des denrées et les chocs climatiques, notamment dans les régions du nord et du centre du Mali.
Distribuée sous la forme de transferts monétaires directs (espèces) ou indirects (denrées), l’assistance du PAM pour la protection sociale permet aux familles vulnérables, comme celle d’Ada, d’accéder à une alimentation saine et diversifiée. Dans son cas, Ada a reçu des transferts monétaires indirects à travers la carte ou coupon électronique, connectée à la plateforme numérique de gestion des bénéficiaires du PAM, dénommée SCOPE. Cette carte lui a permis, pendant trois mois, de se procurer des aliments comme le mil, le riz, l’huile, le sucre, le sel ou des pâtes auprès des commerçants locaux contractés par le PAM.
Grâce à cet appui, la quinquagénaire Ada se dit réconfortée, car elle peut nourrir sa famille sans être obligée de tendre la main. « Cette assistance est un grand soulagement pour mes enfants et moi. Je me sens apaisée de nourrir mes enfants dans la dignité », sourit la cheffe de famille.
De janvier à mai 2023, ce programme a touché plus de 300 000 personnes vulnérables, dont plus de la moitié est constituée de femmes. Parmi elles, 25 % issus des régions de Kayes, Koulikoro et Sikasso ont bénéficié de l’assistance en espèces tandis que 75 % résidant à Gao, Mopti et Ségou ont accédé à l’assistance en vivres, à travers les coupons électroniques. Le programme de protection sociale du PAM est soutenu par des donateurs comme le Canada, l’Allemagne (KFW/BMZ), l’Union européenne, la Suède et l’African Risk Capacity (ARC) Replica.
Il est essentiel de souligner que le PAM joue un rôle clé au renforcement du système national de protection sociale en intensifiant l’aide déterminante pour amortir l’impact social et économique des chocs sur les populations pauvres et vulnérables. L’agence onusienne collabore étroitement avec le gouvernement malien pour renforcer les capacités techniques et de coordination des acteurs de la protection sociale.
Selon les dernières analyses du Cadre harmonisé réalisées en mars 2023, plus de 1,2 million de personnes sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë pendant la période de soudure 2023 (juin-septembre) et ont besoin d’une assistance alimentaire d’urgence. Parmi elles, 2 507 sont en situation de catastrophe alimentaire à Ménaka, de même que plus de 76 000 personnes sont en situation d’urgence alimentaire dans les cercles de Menaka, Ansongo, Gao, Bourem, Bankass, Douentza et Koro. En outre, plus de 1,9 million de personnes ont un besoin urgent de soutien aux moyens de subsistance.